Centrales nucléaires francaises et risque sismique

Nous avons évoqué, concernant les centrales nippones, le risque associé séisme/tsunami du fait le leur présence sur les cotes du Japon et du fait de la cartographie de l’île et de sa position au point de rupture de 3 grandes plaques tectoniques (voir article).

Le Japon n'est pas seul face au risque sismique. Bien d'autres pays y sont sujets, la France, les USA, etc.

Pour la France, l'IRSN à publié en 2011 cette cartographie sismique.


Superposons-y maintenant l'implantation des centrales nucléaires en exploitation en France à la même date et nous obtenons cette carte :





Nous pouvons donc voir qu'aucune de nos centrales n'est exposé au-delà d'un risque sismique modéré. 

Les zones d'aléa sismique plus élevé sont les régions montagneuses où l'implantation de centrales nucléaires n'est pas rendu possible du fait du relief, du risque sismique et très certainement de l'absence de cours d'eau au débit suffisant comme source froide, élément primordial au fonctionnement.

Cependant, et bien que l'aléa sismique soit faible, la centrale de Civaux a connu un séisme de magnitude 3.1 le 9 septembre 2013Le site de Chinon avait lui connu un séisme de magnitude 4.1 le 5 novembre 2006. Les sites n'ont pas été affectés par ces séismes. En effet, ils sont dimensionnés pour résister à un séisme supérieur au plus fort séisme historiquement connu dans la région.

Nous pourrons également retenir le séisme de magnitude 4.4 du 22 mai 2015 au large de la centrale de Gravelines sans atteinte pour les installations. De niveau VII sur l'échelle de Mercalli (magnitude 5.7 à 5.8 estimée), le séisme du 06/04/1580 à été pris en compte dans le dimensionnement de la centrale nucléaire qui peut résister à un séisme de magnitude 6.5. Notons enfin que, son épicentre placé sous la mer, dans la partie anglaise du pas de Calais, est localisé au même endroit que le dernier séisme survenu le 22/05/2015, au large de Douvres.

Japon et nucléaire : choix impossible?

Alors que le Japon semble vouloir reprendre le chemin du nucléaire (article du 11/07/2013, article du 20/12/2012, article du 22/04/2015), après avoir stoppé toute production (voir l'article du 14/05/2012) suite à l'accident survenu à Fukushima en mars 2011,

On apprend, dans un article du 13/03/2015 que 20 Minutes relaie de l'AFP, que le pays s’apprête à démanteler 5 réacteurs, en plus des 6 réacteur de la centrale de Fukushima-Daiichi durement touchée par le tsunami du 11/03/2011.

Alors que, contradictoirement, le même article annonce une durée de vie de 60 ans (sous dérogation), le Japon met à l'arrêt définitif 5 de ses unités de production justement à cause de leur age.

Mais Japon et nucléaire sont-ils compatibles?
Tentons d'y voir un peu plus clair...

Nous savons qu'une centrale nucléaire, et peut importe sa filière, à besoin d'une source froide et ce en grande quantité (voir les explications sur les circuits, le troisième appellé "circuit de refroidissement" sur  le site EDF http://energie.edf.com/nucleaire/comment-ca-marche-y/les-grands-principes-de-fonctionnement-48400.html). Ceci constitue le point d'entrée primordiale de toute présence d'une centrale nucléaire. 2 solutions à cela, soit proche d'un fleuve au débit suffisant, soit en bord de mer où la source froide ne fait pas défaut.

Pour le Japon, ça pourrait être simple; il s'agit d'une île.



Maintenant, regardons où se trouvent implantées les centrales nucléaires nippones; en bord de mer. Logique, s'agissant d'une île, d'autant plus volcanique. Ce qui écarte, du fait de son aspect montagneux (voir la carte de l'USGS sur le site http://www.earth-of-fire.com/article-l-archipel-nippon-tectonique-56829118.html) la présence de centrales proches de cours d'eau.




Le problème de la présence de centrales nucléaires en bord de mer devient alors l'activité sismique (voir le site http://www.earth-of-fire.com/article-l-archipel-nippon-tectonique-56829118.html qui explique bien le processus tectonique auquel est soumis le pays). Non pas que les centrales n'y résistent pas. A leur conception, le risque sismique est pris en considération et majoré sur le plus fort séisme connu (voir le guide 2/01 de l'ASN sur la prise en compte du risque sismique à la conception d'ouvrages de génie civil d'INB) . Non, ce sont les effet d'un séisme, dont le tsunami fait parti, qui deviennent alors sensibles pour toute centrale nucléaire. Perte du réseau d' d'alimentation électrique du fait de la chute des lignes aériennes par ex.



Dans le cas de l'accident majeur survenu le 11 mars 2011 à la centrale de Fukushima, les installations ont correctement réagi au séisme par l'arrêt automatique des réacteurs (pour ceux qui étaient en fonctionnement. Pour ceux qui étaient à l'arrêt le problème est autre), et le déclenchement des sources électriques de sauvegarde dû à la perte de l'alimentation électrique.

C'est la vague du tsunami qui à engendré les dégâts qui ont conduits à la catastrophe par le perte de tout moyen de sauvegarde.

Les japonais appellent cet effet cumulé d’événements genpatsu-shinsai.

Même si j'ai une totale confiance en l'exploitation du nucléaire aujourd'hui (si on retire les causes de l'accident de Tchernobyl en d'autres temps), à la lumière des quelques éléments succins exposés, il me semble que le nucléaire nippon cumule les risques qui s’avèrent fatals en cas d’événements cumulés du type de ceux qui ont conduits à l'accident de mars 2011.

Il en ressort, malgré qu'il faille un accident de cet ampleur pour démontrer que les forces de la nature seront toujours plus puissantes que tous les coefficients de sécurité que l'humain pourra mettre en place pour protéger ses installations, que le retour d'expérience (REX) permet de faire évoluer les institutions, les installations, les équipements, les organisations et les hommes en général.(lien)

Un analyse très détaillée (à mon sens, mais je ne suis pas sismologue), sur ce site.

La place du nucléaire dans la production d'énergie

Dans un article du 02/06/2014, Libération publie avec force détail les chiffres mondiaux de l'énergie 2013.










Toujours sur le site de Libération, un article du 02/02/2015, dresse le bilan électrique de la France pour 2014.

Au jour le jour, RTE (Réseau de Transport d'Electricité) publie sur son site Eco2Mix les données nationales et régionales relatives à la production et à la consommation d'énergie électrique, ainsi que leur origine.

Autre lien intéressant, celui du CNRS qui fait état de la production nucléaire dans le monde, dresse l'état du parc nucléaire mondial en production, à l'arrêt ou en construction, et évoque la production et les stocks, et l'enrichissement et le retraitement de combustible.

Prolongement de la durée de vie des centrales

L'allongement de la durée de vie de nos unités serait-il synonyme de dégradation de la sûreté?

Un long débat que Le Monde, dans sa discussion, relance.

Les Autorités de Sûreté Nucléaire tranchent régulièrement sur la poursuite ou non de l'exploitation de chacune des tranches/unités qui composent notre parc de production d'énergie d'origine nucléaire.

Tous les 10 ans, chacune d'elle est visitée en profondeur. Pendant des mois, les différentes et principales parties de l'unité de production sont scrutées, testées, et validées pour les années à venir. Les examens et maintenance qu'elle subit viennent en complément de la maintenance régulière qui est faite, et du programme annuel établit.

Sans compter le remplacement des gros organes (générateurs de vapeur en l’occurrence), qui risque même d'être élargi au couvercle de cuve. Cuve qui contient le réacteur, pièce maîtresse qu'est la chaudière nucléaire.

Sans compter non plus la prise en compte au fil de l'eau des éléments de Retour d'Expérience (REX) comme cela le fut dernièrement avec l'accident de Fukushima.

Tous les aspects réglementaires sont épluchés et soumis à la validation des Autorités.

En dehors des organes internes d'une unité de production, les bâtiments de l’îlot nucléaire sont auscultés. Ils subissent également leur maintenance, d'après un programme établi.

C'est l'ensemble de ces opérations de maintenance que les Autorités vont scruter pour statuer sur le prolongement ou non de l'exploitation d'une tranche nucléaire jusqu'à la prochaine échéance de réexamen.

Plusieurs aspects à ce rallongement...

D'un point de vue économique, et au regard de l'investissement initial qui est loin d'être anodin, l'exploitant optimise la rentabilité de son outil de production.

Est-ce fait au détriment de la sûreté nucléaire?

Non, bien au contraire. La réglementation évolue et toute unité y est soumise a l'instant? Ce qui fait de notre parc de production nucléaire une référence en matière de sûreté. En effet, contrairement à d'autres pays (comme les Etats-Unis qui, par exemple pensent à prolonger l'exploitation de leur parc à 80 ans -lien, lien) ou l'on se base sur la réglementation de l'époque, il est donc moins dangereux, et donc plus sûr ainsi de faire évoluer le parc nucléaire avec la réglementation s'y afférent.



Concernant le démantèlement, rallonger la durée de vie permet affiner et d'éprouver les méthodes et moyens liés aux activités de déconstruction de sites nucléaires (Brenillis, Chinon, Chooz, St Laurent, Bugey, Creys-Malville par ex. pour les sites français).

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En opposition avec le rallongement de la durée de vie des réacteurs français, le site http://www.energie-crise.fr/spip.php évoque au détour de différents articles les raisons qui font que, à consommation constante, le nucléaire à encore toute sa place face aux énergies fossiles et renouvelables.

On peu également citer l'étude de TotalFina-Elf (in Oil & Gaz Science & Technology,56 :389–402, 2001) qui prédit l’évolution des besoins énergétiques d’ici à 2050, ainsi que leur distribution suivant les différentes sources. Une vue graphique résumant cette étude est transcrite dans la figure 2, p.9 de la Thèse de Fabien PERDU.

A un autre horizon, à plus court terme celui-là, le groupe anglais BP (anciennement British Petroleum), affiche cette projection d'ici à 20 ans.

Pénétrations fond de cuve

Alors que AREVA informe l'ASN d'un problème d'homogénéité dans l'acier composant la cuve réacteur de l'EPR francais, 



Une nouvelle fois les zones sensibles que représentent les pénétrations fond de cuve (PFC) et surtout leur liaison avec la cuve, semblent mises en défaut.

Déjà en 2004, la SFEN, au travers du n°1 de sa revue RGN, relatait une note de la NRC datant d’août 2003 identifiait des problèmes possibles sur les PFC des REP comme suite aux dégradations survenues sur la tranche 1 de la centrale américaine de South Texas Project (STP).

Puis en 2011, c'est en France sur la cuve du réacteur n°1 de la centrale de Gravelines qu'une PFC inquiète un temps les autorités qui, par l'IRSN considèrent le niveau de sûreté retrouvé suite à la réparation.

Nos voisins belges ne dérogent pas non plus avec des fissures découvertes à l'été 2012 sur les unités Doel3 et Tihange2 où, sans parler de PFC, les cuves de réacteur présentaient des défauts autrement plus sévères que ceux relevés en France.

Défense en profondeur et sûreté de conception

L'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) publie en date du 7 avril 2015 un communiqué de presse par lequel AREVA l'a informé d’une anomalie de la composition de l’acier dans certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville.

La réglementation en vigueur relative aux équipements sous pression nucléaires (ESPN) impose au fabricant de maîtriser les risques d’hétérogénéité des matériaux utilisés pour fabriquer les composants les plus importants pour la sûreté.

Dans la conception des réacteurs à eau sous pression français, trois « barrières » de confinement sont interposées entre les produits radioactifs contenus dans le combustible et l’environnement. Il s’agit, dans l’ordre :
  • de la gaine de protection des crayons de combustible,
  • du circuit primaire, circuit d'eau confiné dans l'enceinte qui refroidit le coeur du réacteur,
  • de l’enceinte de confinement.
La cuve du réacteur contribue à la défense en profondeur et est un élément de la 2ième barrière.
Coupde de la cuve d'un réacteur de 900 mégawatts. © IRSN


Les zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur qui présenteraient des défauts dans l'homogénéité de leur acier peuvent être importantes s'agissant en particulier des traversées de couvercle et des pénétrations fond de cuve (PFC) dont des défauts ont déjà été enregistrés sur le parc français, 


L'ASN, dans son communiqué précise que :



"Pour répondre à cette exigence technique, AREVA a mené des essais chimiques et mécaniques sur un couvercle de cuve similaire à celui du réacteur EPR de Flamanville. Les résultats de ces essais ont montré, fin 2014, la présence d’une zone présentant une concentration importante en carbone et conduisant à des valeurs de résilience mécanique plus faibles qu’attendues. Des premières mesures ont confirmé la présence de cette anomalie dans le couvercle et le fond de la cuve de l’EPR de Flamanville. AREVA a proposé à l’ASN de réaliser à partir d’avril 2015 une nouvelle campagne d’essais approfondie sur un couvercle représentatif pour connaître précisément la localisation de la zone concernée ainsi que ses propriétés mécaniques.


"L’ASN se prononcera sur le programme d’essais, contrôlera sa bonne réalisation et instruira le dossier que présentera AREVA pour démontrer la résistance de la cuve du réacteur EPR de Flamanville. Elle fera notamment appel à son appui technique, l’IRSN, et au Groupe permanent d’experts dédié aux équipements sous pression nucléaires.

"L’ASN a informé ses homologues étrangères concernées par la construction d’un réacteur EPR."

France Bleue, mercredi 08/04/2015
Ouest France, mardi 07/04/2015
France 3 Basse-Normandie, mardi 07/04/2015
Sciences et Avenir, vendredi 17/04/2015

Moyens d'intervention en cas d'accident

Au titre des moyens techniques mis en place pour intervenir en cas d'accident nucléaire, il y à, en France, deux principales entités :

Le Groupe INTRA (INTervention Robotique sur Accident), Groupement d'Intérêt Economique (GIE) rassemblant les principaux acteurs du nucléaire français à savoir EdF, CEA et AREVA NC (anciennement COGEMA), à été créé en 1988 suite à l'accident de Tchernobyl.

De 1988 à 1995, le Groupe INTRA était installé dans les locaux du CEA à Fontenay aux Roses en région parisienne.

Depuis juillet 1995, il est installé sur le site du CNPE de CHINON, à AVOINE, dans les locaux de l'ancienne centrale nucléaire UNGG Chinon A2.

Le GIE a en charge de concevoir, exploiter et maintenir à disposition 24h sur 24h une flotte d'engins robotisés capables d'intervenir, à la place de l'homme, en cas d'accident nucléaire majeur, dans et autour des bâtiments industriels de ses membres.

Le Groupe INTRA à par exemple été sollicité dans le cadre de ses conventions à porter assistance à Fukushima au lendemain du tsunami qui à mis à mal les installations nucléaires du site (voir la lettre 29 du Groupe).

Hélinuc, moyen héliporté à, par exemple, réalisé en septembre 1999 une cartographie aérienne du site de St Laurent révélant ainsi les différents taux de Césium 137 (137Cs) sur le site et son environnement proche.

Suivre l'article du 12/06/20165 de La NR.

La FARN


La Force d'Action Rapide du Nucléaire (FARN) dont le gréement est engagé depuis 2012 est une réponse, au lendemain de l’accident survenu en mars 2011 à la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi, à la mobilisation de l'Exploitant EDF face à une centrale nucléaire française qui pourrait être gravement endommagée.

Cette force spéciale est chargée d’intervenir en moins de 24 heures sur un site nucléaire français gravement accidenté. Elle peut désormais apporter et mettre en oeuvre des moyens autonomes de réalimentation en eau, air et électricité et apporter à une centrale française accidentée une capacité d’appui, notamment aux équipes de conduite. 

EDF est ainsi le premier exploitant mondial à se doter d’une telle force spéciale pour compléter son dispositif de gestion de crise nucléaire.